Le Bolchévik nº 195 |
Mars 2011
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Liberté pour le soldat Manning ! Bas les pattes devant Julian
Assange !
WikiLeaks, mensonges et châtiments impérialistes
Nous reproduisons ci-dessous un article de nos camarades
américains publié dans leur journal Workers Vanguard, 7 janvier.
* * *
La publication par WikiLeaks de près de 250 000 câbles
diplomatiques du Département d’Etat américain a provoqué une campagne vicieuse
de représailles par les dirigeants de l’impérialisme US à l’encontre de Julian
Assange, le fondateur du site internet, et du soldat Bradley Manning, pour avoir
permis la fuite d’informations secrètes. Le procureur général Eric Holder serait
en train de préparer des poursuites en justice contre Assange, un citoyen
australien, éventuellement pour infraction à la loi sur l’espionnage de 1917.
Manning est menacé de la cour martiale et il est passible d’une peine de 52 ans
de prison s’il est reconnu coupable. Il a subi la fureur de Washington quand une
vidéo d’un crime de guerre américain à Bagdad a été postée en avril dernier par
WikiLeaks. Elle montrait un hélicoptère de combat Apache mitraillant et tuant au
moins 12 personnes, dont deux journalistes de Reuters, pendant que les pilotes
jubilaient devant le carnage.
Manning – s’il est, effectivement, la source de ces fuites – et
Assange sont des individus courageux qui ont rendu un service louable en levant,
même légèrement, le voile de secrets et de mensonges qui entourent les
machinations impérialistes. Ils méritent amplement d’être défendus par les
ouvriers et les opprimés à travers le monde. Des manifestations en défense
d’Assange ont eu lieu dans un certain nombre de pays et la Confédération
syndicale australienne le défend. Il est d’une importance capitale que la classe
ouvrière internationale défende WikiLeaks et Assange et aussi qu’elle exige la
libération du soldat Manning, détenu dans des conditions de torture avec mise en
isolement dans la prison de la marine américaine de Quantico en Virginie.
Vu la réaction déchaînée de l’administration Obama devant les
dernières fuites, il aurait certainement été difficile de deviner qu’en fait
elles contiennent très peu de révélations fracassantes. Les impérialistes sont
tout simplement enragés à la moindre mise en lumière de leurs actions. Il est
vrai qu’un certain nombre de dépêches sont quelque peu embarrassantes pour les
USA et leurs régimes clients. Ainsi, elles révèlent que l’OTAN avait préparé un
plan militaire secret pour défendre la Pologne et les Etats baltes contre la
Russie. Il est révélé que l’Arabie saoudite, Bahreïn et d’autres pays arabes
font pression sur les USA pour monter une attaque militaire ciblant le programme
d’enrichissement nucléaire de l’Iran, preuve supplémentaire que l’Iran a
besoin d’armes nucléaires pour dissuader les attaques par les USA
ou leur acolyte israélien. Et l’Autorité palestinienne et le gouvernement
libanais sont démasqués en pleine collaboration avec Israël pour cibler,
respectivement, le Hamas et le Hezbollah.
Les dépêches fournissent aussi des informations de source interne
sur les opérations imposées par l’impérialisme US à l’intérieur des frontières
des Etats clients. Ils montrent la participation des USA au commandement
opérationnel de la « guerre contre la drogue » au Mexique, depuis
l’élaboration de la stratégie d’ensemble jusqu’à la sélection des individus à
cibler. Des responsables américains au Yémen ont négocié avec le président de ce
pays un plan pour maquiller des frappes aériennes américaines sur des camps
soupçonnés d’appartenir à Al-Qaïda, et donner l’impression qu’elles avaient été
menées par le gouvernement yéménite, notamment quand des civils en ont été les
victimes. De telles révélations ne sont pas, et c’est peu dire, à l’avantage des
impérialistes ou de leurs laquais. Les documents incluent aussi un rapport de
l’ambassadeur US au Honduras sur le renversement du président populiste Manuel
Zelaya en juin 2009 caractérisant les actions de « l’armée et/ou quiconque a
ordonné le coup d’Etat » d’« illégales » ; quel qu’en ait été
l’instigateur, l’administration Obama soutient le gouvernement issu du coup
d’Etat.
Un sujet particulièrement notable couvert par un nombre de dépêches
est l’affaire Khaled el-Masri, victime de torture. Citoyen allemand d’origine
libanaise, el-Masri a été arrêté fin 2003 alors qu’il était en vacances en
Macédoine, et expédié dans une prison secrète de la CIA en Afghanistan où il
a été mis en isolement, interrogé et battu. Même après que la CIA avait acquis
la confirmation que el-Masri n’était pas l’homme qu’elle croyait (son nom
ressemble à celui d’un suspect des attaques du 11 septembre 2001), ils l’ont
maintenu au secret car « il en savait trop ». Finalement, après près de
cinq mois de détention, el-Masri a été jeté quelque part au fond de l’Albanie
sans avoir jamais été accusé d’aucun crime.
Les documents sur el-Masri, qui ont été envoyés par les ambassades
américaines d’Allemagne, d’Espagne et de Macédoine en 2006 et 2007, confirment
ce qu’on soupçonnait depuis longtemps, à savoir que Berlin n’a pas appliqué ses
mandats d’arrêt à l’encontre de 13 agents de la CIA accusés d’être impliqués
dans le kidnapping de ce citoyen allemand parce que Washington a exercé
d’intenses pressions, menaçant d’« implications négatives potentielles pour
nos relations bilatérales » si l’affaire était poursuivie.
La Maison Blanche d’Obama : vicieuse et vindicative
A la suite de la publication de la vidéo de l’attaque d’hélicoptère
à Bagdad, WikiLeaks a rendu publics près de 76 000 rapports militaires classés
secret défense de l’occupation en Afghanistan qui renseignent sur la violence
infligée par les forces impérialistes aux civils, notamment des attaques
perpétrées par des forces menées par la CIA et opérant à partir des bases
situées le long de la frontière avec le Pakistan. Ensuite en octobre, WikiLeaks
a publié près de 400 000 rapports militaires sur la guerre et l’occupation en
Irak détaillant près de 109 000 morts, surtout des civils.
Le gouvernement d’Obama s’est déchaîné contre le soldat Manning, le
soumettant à des conditions d’emprisonnement inhumaines qui ont clairement pour
intention de le briser. Depuis son arrestation en mai, Manning est maintenu en
cellule d’isolement. Il lui est interdit de faire des exercices physiques ou de
regarder les informations à la télévision ; des matons viennent le contrôler
toutes les cinq minutes ; une lumière est constamment laissée allumée dans sa
cellule, même quand il essaie de dormir. D’après le journaliste David House,
seule personne à part son avocat à avoir pu rendre visite à Manning dans sa
prison, « il est détenu d’une façon punitive avant son procès et cela
affaiblit clairement son état mental » (BBC News, 24 décembre
2010).
Manning est, comme l’a noté à juste titre Assange, un prisonnier
politique. Assange, de son côté, est placé en résidence surveillée en
Grande-Bretagne, en butte à une demande d’extradition suédoise sur des
allégations de « viol » et d’« agression sexuelle ». Ces accusations – qui en
fait se résument à des accusations de relations sexuelles non protégées dans ce
qui semble avoir été de toute évidence des relations consensuelles – sont
manifestement des fabrications. Les procureurs suédois ont ouvert, puis fermé,
puis rouvert une investigation sur ces accusations qui ont été faites par des
groupies de WikiLeaks. En fait, Assange n’a été accusé d’aucun crime.
Comme Assange l’a relevé, la vraie menace est la possibilité d’une
extradition aux USA, où les politiciens aussi bien démocrates que républicains
veulent sa tête accrochée à une pique. Le vice-président Joe Biden, rejoint par
le leader de la minorité du Sénat Mitch McConnell, a caractérisé Assange de
« terroriste high-tech ». Ce que cette diffamation implique comme menace
a été rendu explicite par Tom Flanagan, ancien conseiller du Premier ministre
canadien Stephen Harper, qui a déclaré qu’Assange « devrait être
assassiné ».
Assange est au final un ardent critique libéral de la politique
impérialiste. Fin des années 1990, il a été le coauteur d’un programme de
cryptage appelé Rubberhose que les militants dans des lieux tels que le
Timor-Oriental, la Russie, le Kosovo, le Guatemala, l’Irak, le Soudan ou le
Congo pouvaient utiliser pour protéger des données sensibles. En 2009, Amnesty
International a attribué à Assange son prix pour les médias pour une
investigation de WikiLeaks dans le meurtre de centaines de jeunes hommes par les
forces gouvernementales au Kenya. Le fait que les porte-parole du gouvernement
US envisagent d’attaquer Assange avec la loi sur l’espionnage de 1917 montre
clairement comment les « intérêts nationaux » sont invoqués par les pouvoirs
capitalistes pour faire taire leurs critiques. Entre-temps, Bank of America,
MasterCard, PayPal et Visa Europe ont fait ce qu’ils ont pu pour aider à faire
fermer le site internet d’Assange en bloquant les paiements à WikiLeaks.
La loi sur l’espionnage faisait partie d’un large éventail de
mesures répressives adoptées après l’entrée de l’impérialisme US dans la
Première Guerre mondiale, afin de criminaliser l’activité antiguerre. Elle
stipulait l’emprisonnement pour tout acte qui interfère avec le recrutement des
troupes. Hanté par le spectre de la Révolution bolchévique de 1917, qui arracha
la Russie au marché capitaliste et mit fin à sa participation à la guerre, le
Congrès adopta en 1918 la loi anti-sédition qui criminalisait toute forme de
critique de la « forme du gouvernement US ».
Une des premières cibles de la loi sur l’espionnage, et l’une des
plus célèbres, fut Eugene Debs, porte-parole du Parti socialiste. Il fut
emprisonné pour un discours prononcé en juin 1918 lors d’un rassemblement
ouvrier à Canton dans l’Ohio, dans lequel il caractérisait la guerre
impérialiste de boucherie et rendait hommage aux dirigeants bolchéviques de la
révolution d’Octobre. La même loi fut utilisée en 1953, au plus fort de la
guerre froide, pour exécuter Julius et Ethel Rosenberg, accusés d’espionnage au
profit des soviets durant la Deuxième Guerre mondiale, quand les USA et
l’URSS étaient alliés. Comme l’a dit leur fils Robert Meeropol dans sa
déclaration du 29 décembre en défense d’Assange, la loi sur l’espionnage
« transforma la contestation en trahison ». Au début des années 1970, le
gouvernement Nixon essaya, sans succès, d’utiliser cette loi pour poursuivre
Daniel Ellsberg qui, en diffusant les « Pentagone Papers » au New York
Times, jeta la lumière sur l’histoire de la guerre menée par l’impérialisme
US contre les ouvriers et les paysans vietnamiens.
Même si personne ne sait exactement ce que mijote l’administration
Obama contre Assange, il n’y a aucun doute que la vendetta contre lui fait
planer la menace d’autres attaques contre la liberté d’expression, la liberté de
la presse et autres droits démocratiques. Commentant le cas d’un consultant des
services de renseignement frappé par la loi sur l’espionnage pour avoir révélé
les dépenses dans les programmes d’écoutes, qui constituent selon ce sonsultant
un gaspillage d’argent, le New York Times (11 juin 2010) faisait
remarquer que « dans sa détermination à sanctionner les fuites d’informations
non autorisées, l’administration Obama se montre plus agressive que
l’administration Bush. » Comme nous l’avons souligné à maintes reprises,
Barack Obama, qui est arrivé au pouvoir avec un large soutien des libéraux et de
la gauche, ne fait que remplir sa mission en tant que commandant en chef de
l’impérialisme US – que ce soit le renforcement de l’occupation meurtrière de
l’Afghanistan ou l’accroissement des attaques contre les droits démocratiques au
nom de la « guerre contre le terrorisme ».
Les bolchéviks contre la diplomatie secrète
La réaction furieuse de l’administration Obama aux révélations de
WikiLeaks montre l’importance que les impérialistes capitalistes attachent à la
diplomatie secrète qui, comme le dirigeant révolutionnaire Léon Trotsky
l’expliquait en novembre 1917, « est un outil nécessaire pour la minorité
possédante qui est obligée de tromper la majorité afin de la soumettre à ses
intérêts ». Trotsky faisait cette remarque dans une déclaration publique en
tant que Commissaire aux affaires étrangères de l’Etat ouvrier soviétique qui
venait juste de sortir de la révolution d’Octobre. Trotsky annonçait la
publication et l’abrogation des traités secrets manigancés par le régime
tsariste et le gouvernement bourgeois provisoire avec leurs alliés
impérialistes.
Avant la prise du pouvoir par le prolétariat, le Parti bolchévique
avait exigé l’abolition de la diplomatie secrète et la publication des traités
secrets ; cela faisait partie intégrante de son opposition prolétarienne
révolutionnaire à la Première Guerre mondiale, un conflit entre des
impérialistes en concurrence pour la redivision du monde. Cette
revendication était soulevée contre le gouvernement provisoire qui, venant au
pouvoir après le renversement du tsar durant la révolution de février 1917,
continuait la participation de la Russie dans la guerre.
Immédiatement après la révolution d’Octobre, l’Etat ouvrier publia
un décret sur la paix retirant la Russie de la guerre et exigeant des
belligérants une paix « juste et démocratique » sans annexion ni
indemnités. Deux semaines plus tard, le journal soviétique Izvestia
commença la publication de traités conclus durant la guerre. L’historien E.H.
Carr notait dans le troisième volume de son livre la Révolution bolchévique,
(1917-1923) que la publication des traités, en anglais, dans le
Manchester Guardian galvanisa la gauche britanniques et « fit aussi
une forte impression aux Etats-Unis ». Dans son discours de Canton, Debs
déclara : « Quand les bolchéviks sont arrivés au pouvoir et quand ils ont
parcouru les archives, ils ont trouvé et révélé les traités secrets – les
traités qui avaient été passés entre le tsar et le gouvernement français, le
gouvernement britannique et le gouvernement italien, proposant, après la
victoire, de démembrer l’empire allemand et de détruire les puissances
centrales. Ces traités n’ont jamais été contestés ou répudiés. »
La révolution d’Octobre était un phare de la libération pour les
exploités et les opprimés dans les pays capitalistes avancés et dans le monde
colonial et semi-colonial. Au même titre que l’annulation par le gouvernement
soviétique des accords établis par les régimes précédents, la publication des
traités a contribué à l’éclatement d’une vague de luttes de ceux qui se
trouvaient sous la botte de l’impérialisme, dont les accords crapuleux étaient
maintenant dévoilés.
Un des premiers traités révélés était l’accord de mai 1916 entre le
Britannique Mark Sykes et le Français François Georges-Picot, qui projetait de
dépecer l’Empire ottoman dont ils anticipaient la défaite, comme celle de
l’Allemagne, dans la Première Guerre mondiale. La Russie tsariste approuva ce
pacte à condition qu’elle reçoive une part de l’est de l’Anatolie et
Constantinople (Istanbul) avec son détroit des Dardanelles, un passage
stratégique crucial entre la Méditerranée et la mer Noire. La révélation de cet
accord, qui fut révisé à la fin de la guerre en faveur de la Grande-Bretagne,
eut un effet électrisant au Proche-Orient, dont les peuples espéraient que la
défaite des Ottomans conduirait à leur autodétermination. Des grèves et
manifestations balayèrent l’Egypte en 1919, et l’année suivante en Mésopotamie
(l’Irak actuel) les masses résistèrent face à plus de 130 000 soldats
britanniques déployées pour occuper le territoire. Le gouvernement soviétique
renia aussi les plans du régime tsariste et des impérialistes pour découper la
Perse (l’Iran).
Il y eut un impact similaire en Chine, dont des pans entiers du
territoire étaient partagés entre les impérialistes occidentaux et japonais. Les
soviets publièrent un traité secret signé par le Japon et la Russie en 1916 qui
reconduisait une série d’accords antérieurs pour diviser la Mandchourie, dans le
nord-est de la Chine, en sphères d’influence russe et japonaise. D’autres
territoires, tels que la Mongolie intérieure, étaient similairement délimités.
La renonciation des bolchéviks aux annexions et aux machinations tsaristes en
Chine produisit une grande impression auprès des intellectuels de gauche
influents et parmi les étudiants retournant en Chine après la guerre. Beaucoup
de ces étudiants avaient des illusions dans les promesses
d’« autodétermination » et de justice sociale pour tous les peuples faites par
le président US Woodrow Wilson. Cependant, avec le traité de Versailles de 1919,
les USA et les autres impérialistes attribuèrent à l’empire japonais tous les
territoires de Chine qui appartenaient à l’Allemagne défaite, provoquant une
vague de manifestations de masses connue sous le nom du Mouvement du 4 mai, dont
certains des dirigeants participèrent plus tard à la fondation du Parti
communiste chinois.
Une perspective révolutionnaire
Suite aux révélations de WikiLeaks, un certain nombre
d’organisations « socialistes » réformistes à travers le monde ont parlé
favorablement de la publication par les soviets des traités secrets, pour
ensuite tracer un trait de continuité entre les deux. Bien qu’ayant rendu un
service estimable aux exploités et opprimés, Julian Assange est ce qu’il est :
un libéral bourgeois qui cherche vainement à débarrasser le système impérialiste
de ses pires excès en révélant ses crimes. Les bolchéviks avaient un but
différent. En démasquant les actes des précédents pouvoirs russes et de leurs
clients et alliés impérialistes, ils ont contribué à l’éducation de la classe
ouvrière en Russie et au niveau international. Leur programme était d’étendre la
révolution d’Octobre internationalement, car ils savaient que c’était là le seul
chemin pour arriver à une société socialiste. Cependant, la vague
révolutionnaire qui accompagna et suivit la fin de la Première Guerre mondiale
en Allemagne et ailleurs en Europe échoua à renverser l’ordre capitaliste ;
cela était centralement dû au manque d’un parti d’avant-garde trempé, du genre
de celui que Lénine avait construit en Russie.
Tout en maintenant sa perspective et son programme
internationalistes révolutionnaires, le jeune Etat ouvrier soviétique avait lui
aussi besoin de s’engager dans des accords diplomatiques avec le monde
capitaliste. Ainsi il signa le traité de Rapallo, qui autorisait l’armée
allemande et ses fournisseurs industriels à monter des entreprises sur le
territoire soviétique. Même si cela donnait l’opportunité aux militaristes
allemands de se réarmer, cela permettait aussi de commencer la mécanisation et
la modernisation de l’Armée rouge et des branches connexes de l’industrie
soviétique. Cette partie du traité de Rapallo devait être cachée aux puissances
de l’Entente victorieuses. Comme Trotsky l’écrivait en parlant du régime
bolchévique révolutionnaire : « Quand il l’a pu, il a naturellement trompé
les classes ennemies ; puis il a dit la vérité aux travailleurs ; toute la
vérité, rien que la vérité. Grâce à quoi, uniquement, il a conquis leur
confiance comme nul autre parti au monde » (leur Morale et la nôtre,
1938).
Avec la défaite de la Révolution allemande de 1923, l’Etat ouvrier
soviétique, qui avait beaucoup souffert des effets de la guerre
interimpérialiste et de la guerre civile qui avait suivi la révolution, se
retrouva isolé. Sous des conditions de pénurie, une nouvelle couche
conservatrice et bureaucratisée dans le parti et l’appareil d’Etat, conduite par
Joseph Staline, commença à percer et usurpa le pouvoir politique à partir de
1923-1924. En lieu et place du drapeau de la révolution socialiste mondiale,
Staline mit en avant en 1924 la fausse doctrine du « socialisme dans un seul
pays » à partir de laquelle se développa évidemment le corollaire de la
« coexistence pacifique » avec l’impérialisme. Avec le temps, et contre
l’opposition de Trotsky et ses partisans qui se battaient pour maintenir le
programme de la révolution d’Octobre, les partis communistes furent transformés
d’instruments de la révolution en instruments de collaboration de classes.
Trotsky observait dans la Révolution trahie (1936), son
analyse classique de la bureaucratie stalinienne, que « la
politique étrangère est toujours et partout la continuation de la politique
intérieure, car elle est celle de la même classe dominante et poursuit les mêmes
fins. La dégénérescence de la caste dirigeante de l’U.R.S.S. ne pouvait manquer
de s’accompagner d’une modification correspondante des fins et des méthodes de
la diplomatie soviétique. » Tout en défendant inconditionnellement l’Etat
ouvrier soviétique dégénéré contre l’impérialisme et la contre-révolution
capitaliste interne, les trotskystes se battaient pour la révolution politique
prolétarienne pour balayer la bureaucratie et reprendre le chemin de la
révolution d’Octobre.
Les trahisons de la bureaucratie ont conduit à la destruction
finale de la révolution d’Octobre par la contre-révolution capitaliste en
1991-1992. A la suite de ceci, les impérialistes qui se gargarisent de la « mort
du communisme » sont encore plus acharnés dans leurs ravages, de l’Irak à
l’Afghanistan, et dans leurs assauts contre les droits démocratiques et les
conditions de vie des ouvriers « chez eux ». Les libéraux et la gauche
réformiste se saisissent des révélations sur le fonctionnement (habituel) des
capitalistes au pouvoir – désinformation, police politique secrète, assassinat,
etc. – pour faire pression sur les impérialistes afin qu’ils adoptent des
politiques plus « humaines ». Notre but est de bâtir un parti ouvrier du type
bolchévique. L’impérialisme et ses guerres et occupations sauvages, exécutées
par le mensonge et la duplicité systématiques, ne sera renversé que par la
révolution prolétarienne victorieuse qui, étendue internationalement, posera les
bases pour la libération de toute l’humanité dans un futur monde communiste.